L’écriture en atelier, une pratique inattendue et concrète de la démocratie ?

Ce texte est paru dans le Journal d’alpha à Bruxelles.

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Pour faire exister une notion telle que celle de démocratie, nous avançons que l’écriture en atelier ouvre bien des espaces, et plus particulièrement : un espace de réflexion sur la notion de vérité passant entre autres par la question des choix que l’on fait quand on écrit; un espace d’échange entre personnes dans lequel on découvre que les mots sont nos alliés mais aussi parfois des pièges ; un espace d’invention et de transmission où la ‘mise en fiction’ nous aide à mieux nous situer dans l’espace et le temps ; un espace tissé de normes, un cadre (l’atelier est un dispositif réglé) qui autorise un hors-cadre.

 

Le mot démocratie peut se décliner sur deux registres : – En tant que concept, la démocratie est un nœud où se croisent et se disputent des conceptions politiques,

des habitudes culturelles et sociales, de l’histoire et de l’identité. Elle est donc un objet à penser ensemble, un champ de savoirs à élucider de manière ambitieuse et critique.

En tant que valeur, elle guide nos actes dès lors que ‘l’option d’autrui’ est vécue comme centrale. Il s’agit non seulement de savoir qui nous sommes, mais encore quelles relations, quelles structures sociales et politiques imaginer pour vivre ensemble dans le respect de chacun. Nous y croyons, nous nous engageons pour elle. D’où plusieurs questions : et si l’atelier d’écriture était un moyen de rendre cette notion accessible à tous, une voie inattendue pour en comprendre les multiples aspects ? Et puis, quels pourraient être les apports d’une écriture en atelier qui prend appui sur des idées d’Édu- cation nouvelle 1 et de Culture de paix ?

Rappelons que « la culture de la paix consiste en des valeurs, des attitudes et des comportements qui reflètent et favorisent la convivialité et le partage fondés sur les principes de liberté, de justice et de démocratie, tous les droits de l’homme, la tolérance et la solidarité, qui rejettent la violence et préviennent les conflits en s’attaquant à leurs causes pro- fondes et à résoudre les problèmes par la voie du dialogue et de la négociation entre les individus, les groupes et les États et qui garantissent à tous la pleine jouissance de tous les droits et les moyens de participer pleinement au processus de développement de leur société. »

Les valeurs se construisent dans les pratiques et non dans les discours. Si on adopte ce parti pris matérialiste, la question est de savoir com- ment est ‘dimensionné’ le concept de démocratie. ‘Dimensionne- ment’ est un mot que nous avons découvert en travaillant avec le philosophe Yves Schwartz 3 à Aix-en-Provence. Il s’agit, selon lui, de porter l’attention à l’idée certes, mais surtout aux formes – adéquates ou non – dans lesquelles un concept, quel qu’il soit, s’incarne, se développe et finalement peut se mesurer.

L’atelier d’écriture est-il une forme adéquate pour dimensionner la notion de ‘démocratie’ ? Pour la faire exister même modestement, et permettre à chacun de mieux la comprendre ? Oui, nous en sommes convaincus et pensons qu’il est urgent d’approcher d’une manière générale les concepts de manière créative ! Il est encore plus urgent peut-être, mais dans un deuxième temps, de partir ensemble à la recherche d’arguments qui, dans l’actuel monde de la formation plu- tôt obsédé par le chiffre, ‘légitiment’ ce croisement d’objets aussi dis- parates que des concepts, des valeurs et des pratiques de création.

En rédigeant cet article à propos de notre parcours à l’Université de printemps 2013 à La Marlagne, nous constatons à quel point nous avons, d’atelier en atelier, suivi presque à notre insu un seul et même fil rouge : celui de la vérité et de notre rapport à la vérité. Nous pen- sons que c’est là un des fondements du vivre en démocratie.

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